Colloque sur la situation de la liberté de la presse en Tunisie après le coup d'État anti-constitutionnel du 25 juillet 2021

Colloque sur la situation de la liberté de la presse en Tunisie après le coup d’État anti-constitutionnel du 25.07.2021

Colloque sur la situation de la liberté de la presse en Tunisie après le coup d’État anti-constitutionnel du 25.07.2021

Depuis la révolution de 2011, la Tunisie a souvent été considérée comme une lueur d’espoir pour la démocratie dans le monde arabe. Cependant, le coup de force du 25 juillet 2021, orchestré par le président Kaïs Saïed, a bouleversé cet élan démocratique. En suspendant le Parlement et en concentrant les pouvoirs entre ses mains, le chef de l’État a déclenché une profonde crise politique, remettant en cause les acquis de la transition démocratique.

Parmi les secteurs les plus touchés par cette dérive autoritaire, la liberté de la presse figure en première ligne. C’est dans ce contexte qu’un colloque majeur s’est tenu le 12 mai 2022, réunissant journalistes, universitaires, juristes et membres de la société civile pour évaluer l’impact de cette situation sur les médias tunisiens.

Dans cet article, nous reviendrons sur les points essentiels abordés lors de ce colloque, en analysant les conséquences du coup d’État sur la liberté d’expression en Tunisie.


1. Un climat politique hostile à la presse:

 

Depuis juillet 2021, le climat pour les journalistes tunisiens s’est considérablement détérioré. Le président Kaïs Saïed, en s’arrogeant les pleins pouvoirs, a instauré une forme de gouvernance autoritaire qui ne tolère pas la critique. Plusieurs journalistes ont été convoqués par la justice, menacés ou emprisonnés pour des publications jugées hostiles au pouvoir.

Le colloque a mis en lumière une tendance inquiétante : le retour à une culture de la peur dans les salles de rédaction.


2. Le décret-loi 54 : une arme contre la liberté d’expression:

 

Parmi les instruments juridiques critiqués lors du colloque, le décret-loi 54, promulgué en septembre 2022 sous prétexte de lutter contre la cybercriminalité, a été au centre des discussions. Ce texte criminalise la diffusion de « fausses informations », mais sans en définir précisément les contours, ouvrant ainsi la voie à des poursuites arbitraires contre des journalistes ou des citoyens.

Plusieurs intervenants ont qualifié ce décret de « loi de bâillon », visant à intimider et faire taire toute voix dissidente sur Internet.


3. La presse publique sous contrôle:

 

Autre point soulevé durant le colloque : l’instrumentalisation des médias publics. Depuis la prise de pouvoir de Kaïs Saïed, les directions de plusieurs médias d’État ont été remplacées par des personnalités proches du pouvoir, remettant en cause leur indépendance éditoriale.

La télévision nationale, par exemple, diffuse des contenus de plus en plus favorables au régime, tandis que les voix critiques sont écartées des plateaux. Ce contrôle accru a pour effet de réduire la pluralité des opinions dans l’espace médiatique.


4. Une chute inquiétante dans les classements internationaux:

 

L’une des conséquences visibles de cette répression est la chute de la Tunisie dans les classements internationaux de la liberté de la presse. Reporters Sans Frontières (RSF) a fait état d’une baisse significative du score de la Tunisie dans son Indice mondial de la liberté de la presse.

Cette dégradation témoigne du recul démocratique que connaît le pays et de l’environnement de plus en plus hostile pour les professionnels des médias.


5. Le retour de la censure et de l’autocensure:

 

Dans un climat marqué par la peur des représailles, de nombreux journalistes pratiquent l’autocensure. Des sujets sensibles, tels que les abus de pouvoir, la corruption ou les actions de l’appareil sécuritaire, sont de moins en moins abordés.

Ce phénomène a été décrit par un intervenant du colloque comme « une censure silencieuse qui tue lentement la liberté de la presse ».


6. Les femmes journalistes face à la double répression:

 

Le colloque a aussi mis en lumière les difficultés spécifiques rencontrées par les femmes journalistes. En plus des menaces liées à leur travail, elles subissent des attaques sexistes, des campagnes de harcèlement en ligne, et parfois des violences physiques.

Certaines ont été ciblées pour leurs opinions politiques, d’autres pour leur simple visibilité médiatique. Cette double peine renforce les inégalités dans le monde des médias tunisiens.


7. La société civile en résistance:

 

Malgré les obstacles, la société civile tunisienne reste active et mobilisée. Des ONG locales et internationales, comme le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), continuent de défendre les droits des journalistes, de dénoncer les abus et de former des réseaux de solidarité.

Le colloque a également permis de rappeler l’importance de la pression internationale pour faire reculer les atteintes aux droits humains.


8. L’importance du journalisme d’investigation en temps de crise:

 

Plusieurs participants ont souligné la nécessité de renforcer le journalisme d’investigation, en particulier dans un contexte où le pouvoir cherche à dissimuler certaines réalités. Pourtant, ce type de journalisme est de plus en plus risqué, avec des reporters surveillés, intimidés ou empêchés d’accéder à l’information.

Un appel a été lancé pour créer des mécanismes de protection des journalistes d’investigation et garantir leur liberté de travailler en toute sécurité.


9. Vers une réforme législative ?

 

Une des propositions centrales du colloque fut l’idée d’engager une réforme législative, visant à abroger ou réviser le décret-loi 54, mais aussi à renforcer l’indépendance des médias publics, garantir la transparence du financement des médias privés, et instaurer des garde-fous juridiques contre les abus de pouvoir.

Cette réforme serait essentielle pour restaurer un climat de confiance entre les médias, les citoyens et les institutions.


10. L’appel à la communauté internationale:

 

Enfin, les participants ont lancé un appel à la communauté internationale, afin qu’elle soutienne la presse tunisienne dans cette période critique. Cela inclut un soutien financier, technique, mais aussi politique pour faire pression sur le gouvernement tunisien et l’amener à respecter ses engagements en matière de droits de l’homme.

L’enjeu est de taille : préserver l’un des derniers bastions de la démocratie dans la région MENA.


 Défendre la liberté de la presse, c’est défendre la démocratie:

 

Le colloque du 12 mai 2022 a mis en évidence une réalité alarmante : la liberté de la presse en Tunisie est en grave danger. Le coup d’État du 25 juillet 2021 a ouvert la porte à une série de mesures autoritaires qui mettent en péril les droits fondamentaux des citoyens.

Mais l’espoir n’est pas perdu. Grâce à la mobilisation des journalistes, des organisations de la société civile, et au soutien des partenaires internationaux, une résistance s’organise. La défense de la liberté de la presse ne concerne pas uniquement les professionnels de l’information — elle concerne chaque citoyen, car sans presse libre, il n’y a pas de démocratie.

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